L’opération militaire répondant à l’attaque sanglante de la résistance palestinien‧ne sur les colonies israéliennes jouxtant le ghetto de Gaza le 7 octobre 2023 a très vite été le théâtre de crimes de guerre contre les populations civiles palestinien‧nes. Rappelons d’abord le véritable bilan de l’attaque menée le 7 octobre 2023 par le Hamas contre plusieurs bases militaires et colonies du Sud d’Israël[1], ainsi que d’un festival de musique : au cours de l’action armée, 1139 personnes ont été tuées, dont 695 civils (parmi lesquels 71 étranger‧es et 36 enfants) et 373 membres des forces de sécurité (305 militaires, 58 policiers et 10 membres des services de renseignement du Shin Bet)[2]. Le Hamas a également pris 251 personnes en otages (dont de nombreux militaires) dans le but de faire pression sur l’Etat d’Israël, notamment afin d’obtenir la libération de centaines de prisonniers palestinien‧nes, dont plus de 1300 étaient détenus sans charges ni procès avant le 7 octobre 2023[3]. En riposte, l’armée israélienne dit avoir tué plus d’un millier de combattants du Hamas ayant pris part à l’attaque, tandis que des enquêtes indépendantes, ainsi que les témoignages d’un certain nombre de civils israéliens survivants, lui attribuent également un grand nombre de morts civils israéliens parmi ceux officiellement attribuées au Hamas. Les experts invoquent à ce propos l’application du « protocole Hannibal », une directive israélienne de 1986 qui préconise d’éviter au maximum d’avoir à négocier la libération d’otages, quitte à tuer ses propres ressortissants pris en otages lors de l’assaut prévu pour les libérer. Une chose est certaine, c’est que cette aventure sanglante du Hamas a légitimé un déferlement de violence sans précédent de la part d’Israël, qui a été condamné par la Cour Internationale de Justice pour des faits de génocide à l’encontre des Palestinien‧nes de Gaza.

Les règles de la guerre conventionnelle ont en effet été largement enfreintes, d’abord par la pratique proscrite du siège, bloquant l’approvisionnement en eau, électricité et nourriture des populations, puis par l’utilisation combinée d’armes interdites par les conventions internationales (armes chimiques telles que le phosphore blanc), de snipers et de drones tueurs ciblant des civils non-armés, ainsi que le bombardement massif de zones résidentielles, de camps de réfugiés, de véhicules et de locaux d’ONG humanitaires, de lieux de culte, d’écoles et d’hôpitaux. Dès les premières semaines de l’opération, des dizaines de travailleurs humanitaires, de médecins en activité et de journalistes ont été tués ou arrêtés et transférés dans des centres de détention sans procès préalable. Les images des services de communication du régime et de l’armée israéliennes n’ont pas cherché à dissimuler le recours à des traitement inhumains et dégradant à l’égard des prisonniers, qui ne bénéficient pas du statut de prisonniers de guerre, ni d’otages, l’un ou l’autre statut impliquant l’adoption de procédures et négociations spécifiques pour leur maintien en détention ou leur libération dans le cadre de négociations entre les parties au conflit. Les soldats de l’IDF eux-mêmes n’ont cessé de communiquer dès le premier jour de l’opération sur les réseaux sociaux, et notamment sur Tiktok et Telegram, se targuant quasi quotidiennement de commettre des crimes et diffusant des vidéos accablantes témoignant de leur déshumanisation des Palestinien‧nes. On reparlera de cet aspect plus loin.

 

Montage de vidéo issues des réseaux sociaux, pour montrer une petite partie de ce que les forces de défense israéliennes ont commis et continuent de commettre à Gaza depuis octobre 2023.
Trigger warning : certaines images sont difficiles Ă  regarder.

 

Les réseaux sociaux relatent la vérité

Les crimes de guerre sont par conséquent entièrement avérés et documentés, aussi bien par la communauté internationale que les ONG et les médias, y compris israéliens. Au-delà des institutions et structures conventionnelles, les réseaux sociaux se sont également largement fait l’écho de ces crimes et doivent être considérés comme des sources d’information légitimes à partir du moment où elles transmettent des témoignages bruts depuis une zone directement impactée. A ce titre ces ressources ont autant de valeur probante que les témoignages de victimes et parties civiles, ainsi que les aveux des auteurs lors d’un procès pénal, et ceci quel que soit l’usage postérieur qui est fait des images ainsi rendues publiques. Par ailleurs, les comptes utilisateurs, ainsi que les lieux et datations des captations vidéo peuvent aisément faire l’objet de vérifications et fact-checkings par des experts et enquêteurs, interdisant de les considérer décemment comme fabriquées ou manipulées : la grande majorité des milliers de mégaoctets de données provenant de Gaza NE PEUVENT PAS être le résultat de fake news et d’images de synthèse comme d’aucuns le prétendent. Les sociétés ont évolué, et la prise en compte de la modernité implique de reconnaître les nouvelles modalités d’information et de communication comme légitimes, notamment parce qu’elles garantissent une plus grande diversité de sources que les médias mainstream et nationaux. On sait cependant combien les Etats sont embarrassés par les media qui échappent à leur contrôle, d’où leurs efforts constants pour obtenir la censure totale des contenus critiques partagés sur les réseaux sociaux.

Légitime défense ou représailles ?

Une fois qu’on a écarté l’hypothèse négationniste ou révisionniste, qui implique le déni par rapport à la réalité des crimes commis par l’armée israélienne contre les Palestinien‧nes, il reste à se pencher sur les motivations de ces crimes et sur leur caractère intentionnel. La notion d’intentionnalité est cruciale pour plusieurs raisons. D’abord parce qu’elle permet de distinguer la légitime défense de la vengeance ou des représailles, ensuite parce qu’elle permet d’identifier la finalité réelle de l’acte de violence ou du crime. La légitime défense, qui est une règle élémentaire au croisement du droit naturel et du droit positif, définit la circonstance dans laquelle on peut tuer une personne ou porter atteinte à son intégrité sans craindre d’être puni. Pour définir précisément les circonstances dans lesquelles elle peut être mobilisée, le droit a identifié plusieurs critères qui doivent se cumuler pour qu’on puisse estimer qu’il y a légitime défense : la menace doit être réelle (non imaginée ou supposée) et imminente (non antérieure au moment de la riposte), la riposte doit être immédiate (cantonnée à la seule source de la menace et sans délai, sinon il s’agit de représailles), nécessaire (on ne doit pas pouvoir écarter autrement la menace) et proportionnée à la menace (juste ce qu’il faut pour neutraliser la menace). A ses origines, cette règle a été pensée pour permettre à l’individu dépourvu d’autorité légale de se protéger en cas d’agression, mais aussi d’être protégé de toutes sanctions ou poursuites judiciaires s’il a fait usage de violence pour se défendre d’une autre violence. Mais depuis une décennie les autorités légales (qu’on voudrait croire légitimes), donc l’Etat et ses représentant‧es, ont progressivement fait évoluer le discours et les lois pour s’approprier des règles de droit réservées aux seuls justiciables.

Si l’on prend davantage de hauteur et qu’on se réfère au contexte théorique global dans lequel ces évolutions ont pris place, on ne peut que faire le parallèle avec l’argumentaire mobilisé par l’Etat d’Israël et ses alliés pour légitimer le massacre implacable des Arabes de Gaza, exclusivement basé sur son « droit à se défendre » suite à l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023. Les questions très pragmatiques que le monde entier aurait dû se poser sont les suivantes : la menace représentée par la population de Gaza à l’encontre de la société israélienne était-elle réelle ? La riposte, à savoir l’anéantissement total d’une enclave habitée par plus de deux millions de personnes, était-elle nécessaire et proportionnée ? Si les critères d’imminence et d’immédiateté sont bien respectés en apparence, il aurait été nécessaire de se poser une ultime question pour finir d’invalider l’argument d’Israël selon lequel sa riposte était légitime : l’attaque du Hamas s’inscrivait-elle dans un contexte actuel et permanent d’oppression et de violences coloniales de la part d’Israël, ou était-elle un acte d’agression gratuite ne répondant à aucune menace à l’encontre des populations de Palestine ? Et avant que l’on s’apprête à répondre à cette question, il est absolument nécessaire de se remémorer les événements historiques tels que le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943 ou les émeutes du township de Soweto en 1976, et de tirer les parallèles qui s’imposent : l’Etat d’Israël n’est pas colonisé ni oppressé, il est le colonisateur et l’oppresseur. A ce titre, il ne peut en aucun cas se prévaloir de la légitime défense, car si l’on suit cette logique, la France aurait été légitime à rayer de la carte l’intégralité de l’Iraq et de la Syrie suite aux attaques de l’Etat Islamique sur Paris en 2015. Et en réponse n’importe quel pays Arabe serait légitime à bombarder les villes occidentales à chaque fois que les armées de l’OTAN s’immiscent avec force dans ses affaires nationales. On voit bien que la logique légitimant l’arabicide de masse ne tient pas. Pour autant, c’est exactement celle-là qui a amené les Etats-Unis à détruire durablement l’Iraq entre 2003 et 2011, prétextant une menace nucléaire que les meilleurs analystes savaient être totalement irréelle. L’Occident a toujours une raison fallacieuse sous le coude pour détruire les sociétés arabes.

Au-delà de la violence et de l’horreur de l’attaque du Hamas, personne ne peut nier décemment l’absence d’impérieuse nécessité justifiant l’anéantissement de la bande de Gaza à partir du 8 octobre, ni la disproportion totale des moyens employés pour cela, alors que les assaillants du 7 octobre ont été en grande partie décimés ou faits prisonniers lors de leur attaque (1809 combattants selon Israël) et que les 5000 roquettes tirées par le Hamas ont été largement interceptées, n’ayant pas tué plus de cinq personnes au total : la menace principale et imminente était donc neutralisée au soir du 7 octobre, la légitime défense stricto sensu ne valant que pour la riposte engagée par les israéliens le jour-même. La vengeance quant à elle se caractérise par la préméditation et/ou par un infléchissement moral, donc par l’anticipation ou la préparation (y compris mentale) du crime avec la volonté de ne pas agir de façon éthique. Enfin, si la motivation ou la finalité réelle de l’action armée est souvent officieuse, voire secrète, et par conséquent peut faire l’objet d’interprétation, il existe en droit ce qu’on appelle des « faisceaux de présomption », qui permettent d’établir s’il y a des motivations criminelles, racistes notamment. Dans le contexte de la Palestine, ces faisceaux de présomption peuvent notamment consister dans des actes et déclarations publiques témoignant d’une volonté d’essentialiser l’ensemble de la population de Gaza et de l’assimiler dans sa globalité à un groupe spécifique, ici le Hamas. Cette essentialisation passe par l’utilisation d’une terminologie réductrice et simplificatrice gommant la complexité et la diversité qui caractérise toute population civile, notamment si elle regroupe plusieurs milliers de personnes. Dans le cas de Gaza, on parle de 2,23 millions d’habitants, incluant une multitude de minorités ethniques, religieuses et politiques, ainsi que des milliers de binationaux et 1,046 millions d’enfants de moins de 18 ans (48%).

Le Hamas est au pouvoir Ă  Gaza, mais les Gazaouis ne sont pas le Hamas

Si l’on remonte aux origines du mouvement Hamas, on note qu’il est né tardivement en 1987, soit près de 40 ans après la création d’Israël. Avant lui, la résistance palestinien‧ne a été incarnée par des mouvements politiques nationalistes, socialistes et laïcs, dont le Fatah, fondé en 1959. Ces mouvements ont renoncé globalement à la lutte armée à l’issue de la première intifada (1987-1993) pour s’investir dans les négociations de paix, tout en restant solidaire de la résistance populaire au régime d’apartheid israélien. La perpétuation de l’oppression violente des Palestinien‧nes malgré les pourparlers de paix a été la raison première de l’émergence des forces islamistes en Palestine, qui coïncide avec la confessionnalisation des conflits territoriaux dans la région lors de la guerre civile au Liban (1975-1990). Israël a participé alors activement à cette confessionnalisation, notamment en soutenant les milices chrétiennes libanaises, tout en favorisant l’émergence du Hamas pour affaiblir les organisations palestinien‧nes socialistes et non-confessionnelles (OLP : Fatah, PFLP, DFLP, PPP, PLF…). L’emprisonnement et la mort des leaders politiques impliqués dans la négociations des accords de paix, puis la seconde intifada (2000-2004) et la guerre du Liban en 2006 ont ensuite accéléré la montée en puissance du Hamas en Palestine, ainsi que du Hezbollah au Liban. Enfin, en 2006 le Hamas a remporté les élections à Gaza avec 44,45% des voix exprimées, les forces politiques nationalistes et socialistes laïques restant majoritaires mais divisées (Fatah + PFLP + The Alternative + Independant Palestine = 51,32% des voix). Si l’on revient en détail sur ces élections et qu’on prend en compte le taux d’abstention de 22,82%, ce ne sont que 32,61% des électeurs inscrits qui ont choisi le Hamas. Si l’on considère que 34,17% de la population palestinien‧ne n’était pas inscrite sur les listes électorales ou pas en âge de voter, ce ne sont finalement que 11,14% de l’ensemble des 3,95 millions de Palestinien‧nes de l’époque qui ont choisi le Hamas.

Au cours de la décennie suivante, le Hamas s’est imposé comme une force conservatrice ne tolérant aucune critique et réprimant toute opposition, ce qui le rend relativement impopulaire, comme en témoigne un sondage effectué en juin 2023 par le Palestinian Center for Policy and Survey Research : 73% des Gazaouis considèrent qu’il y a de la corruption au sein du Hamas, 59% estiment qu’on ne peut critiquer le Hamas sans craintes, 57% voteraient pour Marwan Barghouti (Fatah) s’il était libre plutôt que pour le candidat du Hamas, tandis que 43% estiment que ni le Hamas, ni le Fatah ne méritent de représenter les Palestinien‧nes. Par ailleurs, 47% des Gazaouis privilégient la résistance pacifique par rapport à la lutte armée [https://pcpsr.org/en/node/944]. Enfin, les dernières élections ayant eu lieu il y a 18 ans, près de 78% de la population actuelle n’était pas née (48%) ou n’était pas en âge de voter en 2006 (30%), sans compter qu’une partie de la population, et donc des électeurs du Hamas, est décédée au cours des 18 dernières années. Par conséquent, on peut dire que la population Gazaouie en 2023 n’a peu ou rien à voir avec l’élection du Hamas en 2006, ni beaucoup plus avec son maintien au pouvoir par la contrainte depuis.

Le Hamas : un mouvement de réaction

Au-delà, et c’est souvent occulté lorsqu’on parle de la résistance palestinien‧ne, le processus d’essentialisation affecte également les militants du Hamas eux-mêmes. Notamment, l’affiliation historique du Hamas aux frères musulmans (donc à l’islam politique) est niée et celui-ci est comparé aux courants djihadistes, voire régulièrement assimilé à Al Qaeda ou l’Etat islamique. De nombreux intellectuels et spécialistes, qu’on ne peut accuser d’être sympathisants des islamistes pour la plupart d’entre eux, ont écrit une multitudes de thèses universitaires et de livres sur l’histoire de l’islam, ainsi que sur les courants religieux et politiques au sein de l’islam. Toutes ces études permettent de comprendre pourquoi les Frères musulmans ne sont pas djihadistes, et pourquoi l’institutionnalisation de l’islam politique conduit quasi systématiquement ces courants à se modérer dans l’exercice du pouvoir. L’orientalisme qui caractérise l’analyse des courants musulmans et islamistes aujourd’hui se heurte par ailleurs à la réalité vécue par les populations arabes et musulmanes confrontées à ces mouvements. Ce que dit cette réalité, c’est que les Frères Musulmans constituent une menace modérée, pour la population sous son contrôle comme pour ses voisins, ou en tout cas toute aussi prégnante que n’importe quel parti ou mouvement politique autoritaire au pouvoir. En effet, le despotisme du Hamas contre la population civile ne découle pas spécifiquement de sa radicalité religieuse, mais plus de sa volonté de maintenir une emprise hégémonique sur les populations palestinien‧nes. Au même titre que n’importe quel courant d’extrême-droite dans le monde, le Hamas est un parti autoritaire portant des valeurs conservatrices et rétrogrades sur de nombreux aspects, mais ce n’est pas un mouvement salafiste ou djihadiste : le Hamas, aussi violent soit-il, ne décapite ni ne brûle personne vivant. Enfin, les motivations de l’engagement des combattants du Hamas sont aussi à évaluer au regard de la situation d’étranglement et d’oppression continuelle des populations palestinien‧nes depuis 75 ans, ainsi que du blocus imposé à Gaza par Israël depuis 16 ans, impliquant un taux de chômage supérieur à 45% et l’absence globale de perspectives pour les jeunes. Les militants du Hamas ne font pas le jihad, ils rejoignent le seul mouvement armé décolonial qui prétend s’opposer à la normalisation et constituer un rapport de force au régime d’apartheid israélien. Le nombre de combattants affiliés au Hamas n’est d’ailleurs pas connu, le seul chiffre de 30 000 étant donné par Israël. Au regard de la réalité régionale, et notamment des effectifs des autres milices islamistes recensées (notamment le Hezbollah), il est improbable que le nombre réel de combattants du Hamas dépasse les 20 000 hommes, ce qui ne témoigne pas d’une adhésion massive des Gazaouis au mouvement.

Le paravent antiterroriste

On comprend alors qu’Israël dans ses efforts pour déshumaniser les Palestinien‧nes et décrédibiliser la résistance palestinienne trouve confortable d’utiliser la rhétorique antiterroriste : comme tous les régimes autoritaires et coloniaux, Israël désigne ainsi les résistants à son oppression comme des terroristes. Cette sémantique désormais acceptée universellement trahit non seulement l’ignorance et l’étroitesse d’esprit de ceux qui l’emploient, mais également leur intention de réduire toute résistance armée ou toute opposition radicale ou révolutionnaire à une menace. Sous couvert de protéger la population civile d’une menace contre leur sécurité, ce qui n’est pas sa motivation réelle, l’anti-terrorisme est avant tout un outil de la contre-insurrection pour protéger la sûreté et les intérêts de l’Etat. Désormais, il suffit de désigner un groupe comme terroriste pour priver instantanément ses membres de tous les droits et protections normalement garanties par les lois de la guerre, les lois humanitaires et les conventions internationales pour le respect des droits et de la dignité humaine. Le qualificatif de terroriste ne bénéficie par ailleurs d’aucune définition juridique précise, ce qui rend la notion floue et entièrement sujette à interprétation. Le terme est ainsi venu s’ajouter au terme « barbare » pour destituer tout individu de sa qualité d’être humain, rendant licites et acceptables à son encontre humiliations publiques, exécutions sommaires, torture, mutilations et sévices corporels. La France en Algérie, les USA au Vietnam, en Afghanistan et en Iraq, la Russie en Tchétchénie ou même la Chine au Xinjiang ont largement contribué à la normalisation de pratiques cruelles et illégitimes au regard des conventions des Nations-Unies. Là où Israël franchit encore davantage la ligne rouge, c’est lorsqu’il assimile dans sa globalité la population civile gazaouie au terrorisme, en arguant de sa complicité avec le Hamas, ceci incluant les enfants mineurs qui, on l’a dit, constituent presque la moitié de la population de Gaza. En favorisant la diffusion de mensonges éhontés sur la commission par le Hamas d’actes de cruauté à l’occasion de l’attaque sanglante du 7 octobre 2023, et notamment les prétendus décapitations d’une quarantaine d’enfants et viols en série[4], Israël savait pertinemment que la barbarie et le terrorisme seraient le registre lexical approprié pour légitimer a priori tous les crimes de guerre qui allaient être commis en représailles à l’égard des Gazaouis. Cela fait partie des stratégies de propagande de l’Etat d’Israël, la Hasbara, qui participent du lobbying sioniste visant à contrer les discours négatifs délégitimant Israël. La diabolisation des Palestinien‧nes pour convaincre tout-un-chacun du bien-fondé de leur anéantissement s’ajoute ainsi au révisionnisme historique quant à la manière dont s’est construit et imposé par la violence l’Etat d’Israël et au négationnisme quant à la perpétration de crimes par les milices sionistes avant 1948 et par l’armée israélienne depuis. On est censé ainsi oublier que la milice sioniste Irgun commettait des attentats à la bombes contre les civils et l’armée britannique durant les années précédant la création d’Israël, avant que son chef Menahem Begin devienne premier ministre puis ministre de la défense d’Israël trente ans plus tard, opportunément blanchi de ses crimes. L’Etat d’Israël est par conséquent le meilleur exemple de terrorisme victorieux et impuni. La question qui se pose est donc : qui décide qui est terroriste et pendant combien de temps ?

Quoi qu’il en soit, le concept de terrorisme constitue un outil extrêmement pratique pour désigner les résistances populaires, et cela quels que soient leurs fondements idéologiques. Au-delà, ce sont les communautés arabes dans leur globalité qui sont visées. L’Arabe est devenu l’ennemi pratique numéro un, le bouc-émissaire qui peut porter la responsabilité de toutes les résistances populaires à la volonté hégémonique et civilisatrice de l’Occident. Il suffit désormais d’une seule attaque à main armée lancée par un individu ou un groupe marginal issu des communautés arabo-musulmanes pour légitimer l’élimination de dizaines de milliers de vies arabes. La punition collective s’en trouve ainsi normalisée. Et on peut parler de la mise à mort lente des Arabes de Palestine parce que c’est d’actualité, mais il ne faut pas oublier que les interventions occidentales en Orient depuis le Moyen-âge tardif sont toutes guidées par la même volonté messianique de récupérer la « Terre sainte » aux barbares hérétiques ou impies qui l’habitent, en l’occurrence les Arabes[5]. Ce qui a évolué au cours de la seconde moitié du 20ème siècle, c’est la rhétorique, mais pas les motivations. Depuis que les Nations occidentales se sont érigées en avant-garde éclairée et qu’elles ont promulgué leurs lois de la guerre et toutes sortes de conventions humanitaires, avant d’accorder leur indépendance à nombre de pays après des décennies de suprémacisme racial, de pillages coloniaux et d’esclavage, elles ont en effet été contraintes de renouveler leurs discours pour pouvoir continuer à justifier les guerres impérialistes menées au nom de la Bourse et du Marché, notamment là où gisent le pétrole et le gaz. Et quel meilleur thème que celui, si familier, du barbare venu d’Orient ? Mais pas juste un barbare ordinaire, qui mènerait une bataille respectant les lois de la guerre, et dont une partie du peuple et de la gauche occidentale pourrait trouver la cause légitime. Non, plutôt le paroxysme du barbare, monstrueux et cruel, qui terrifie quiconque se prend à l’imaginer près de soi. Ce barbare-là, l’Occident le qualifiera de « terroriste » pour simplifier. Et s’il n’existe pas, il faudra aider à le créer ou à ce qu’il se crée par lui-même, l’important étant qu’il épouvante suffisamment n’importe quel quidam pour que ce dernier accepte sa mise à mort sans autre forme de procès. Ce monstre-là, c’est le terroriste musulman, qui dans l’imaginaire occidental ressemble à l’Arabe à la fois vil et brutal incarné par Mohammed Hassan aka Frank Lackteen dans les films américains des années 1930-40, mais aussi à 78% des personnages originaires du Proche et Moyen Orient apparaissant dans les séries télévisées étasuniennes[6].

Dès lors, dès qu’un Arabe ou un musulman lancera une attaque surprise ou fera sauter une bombe ici ou là, il faudra bien comprendre qu’il s’agit d’un acte spécifiquement odieux, qui n’a rien à voir avec les attaques à la bombe des résistant‧es de la seconde guerre mondiale, l’anéantissement de Nagasaki et Hiroshima en 1945, les actions de contre-insurrection appliquées par l’armée et la police françaises contre les populations civiles algériennes entre 1945 et 1962, le bombardement du groupe noir américain Move en pleine ville par la police de Philadelphie en 1985 ou encore les assassinats ciblés régulièrement effectués à l’aide de drones ou de missiles téléguidées par les armées des grandes démocraties[7]. Ce qui les distingue alors, c’est très précisément le prisme raciste par lequel on désigne les auteurs de ces violences. Les uns, qu’on pourra qualifier de méchants, sont par nature les agresseurs, tandis que les autres, évidemment gentils, agissent nécessairement en légitime défense. Les premiers tuent aveuglement pour terroriser et générer le chaos, tandis que les seconds « neutralisent des cibles » pour ramener la paix et la sécurité. Au-delà du caractère ironique de ces dernières phrases, il faut se rendre compte à quel point ces caricatures sont hélas proches des discours servis communément par les élites politiques et médiatiques du monde entier, et repris par le plus grand nombre sans réel soupçon critique. Il n’y a pas de bons terroristes, il n’y a que de mauvais Arabes et de mauvais Musulmans. Mais quand un Blanc massacre des dizaines d’enfants dans une école américaine ou poignarde des Arabes dans une ville de France[8], personne n’emploie le terme terroriste. C’est donc bien une appellation d’origine contrôlée.

Israël, incarnation du suprémacisme blanc et du racisme anti arabe

A Gaza, IsraĂ«l commet des crimes, c’est Ă©tabli. La seule chose qui ne fait pas consensus, c’est leur justification/lĂ©gitimation. On doit donc s’intĂ©resser ici Ă  ce qu’on appelle en droit le « mobile du crime », ce qui nous ramène aux « faisceaux de prĂ©somption » Ă©voquĂ©s plus haut. Cela nĂ©cessite d’analyser la relation organique entre IsraĂ«l, l’Europe et l’AmĂ©rique du Nord. On ne tournera pas autour du pot : nous voulons aborder ici la proximitĂ© idĂ©ologique du sionisme et du nationalisme allemand, qui combinent tous deux projet colonial et suprĂ©macisme racial/national. En plus de considĂ©rer la race ou la nation dĂ©fendue comme supĂ©rieure ou choisie par la volontĂ© divine (messianisme/millĂ©narisme), les deux nationalismes s’accordent sur l’assujettissement ou l’anĂ©antissement possible – et donc acceptable d’un point de vue moral – d’autres nations ou races jugĂ©es arriĂ©rĂ©es ou infĂ©rieures. Les versions les plus modĂ©rĂ©es de ces nationalismes[9] se contentent d’évoquer la nĂ©cessitĂ© d’apporter le progrès et le dĂ©veloppement Ă  des populations figĂ©es dans le passĂ©, sous couvert de modernisme le plus souvent. C’est le cas du sionisme. Ce mouvement idĂ©ologique a Ă©tĂ© initiĂ© par le journaliste et Ă©crivain austro-hongrois et ashkĂ©naze Theodor Herzl (1860-1904) en 1897. A partir de lĂ  se sont tenus de nombreux congrès sionistes internationaux, qui ont mis en place des structures incitant la diaspora Ă  accomplir son « aliyah » (l’ascension), Ă  savoir son installation en Palestine, qui est alors sous domination ottomane (turque seldjoukide) depuis 1517, puis passe sous occupation britannique Ă  partir de 1920. L’opinion personnelle de Herzl Ă©tait profondĂ©ment influencĂ©e par les thĂ©ories suprĂ©macistes allemandes et il voyait dans l’installation en Palestine un projet hygiĂ©niste visant la civilisation des peuples orientaux, y compris les Juif‧ves autochtones. Ses dĂ©tracteurs antisionistes, tels que Abraham Shalom Yehuda (1877-1951), Juif de Palestine, et Reuven Snir (nĂ© en 1953), Juif d’Irak, ont mentionnĂ© certains passages Ă©loquents dans les mĂ©moires de Herzl, publiĂ©es en 1960 : « C’est la volontĂ© de Dieu que nous revenions sur la terre de nos pères, nous devrons ce faisant reprĂ©senter la civilisation occidentale, et apporter l’hygiène, l’ordre et les coutumes pures de l’Occident dans ce bout d’Orient pestifĂ©rĂ© et corrompu […] C’est avec les Juif‧ves, un Ă©lĂ©ment de la culture allemande qui va aborder les rivages orientaux de la MĂ©diterranĂ©e […]. Le retour des Juif‧ves semi-asiatiques sous la domination de personnes authentiquement modernes doit sans aucun doute signifier la restauration de la santĂ© dans ce bout d’Orient nĂ©gligĂ© ». A ce titre, on peut tirer un parallèle très clair avec les pensĂ©es et Ă©crits du gĂ©ographe Friedrich Ratzel (1844-1904) et du philosophe Karl Haushofer (1869-1946), contemporains de Herzl, et notamment avec leur thĂ©orie du « Lebensraum » (espace vital) qui inspirera largement les thĂ©ories suprĂ©macistes dĂ©veloppĂ©es par Hitler dans Mein Kampf, quand bien-mĂŞme Ratzel imaginait plutĂ´t une installation coloniale du peuple Allemand au cĹ“ur de l’Afrique (Mittelafrika), plutĂ´t qu’en Europe Orientale comme le prĂ©conisaient les idĂ©ologues du nazisme. Quoi qu’il en soit, Ratzel comme Herzl plaçaient tous deux leurs ambitions coloniales et civilisatrices au-delĂ  de la MĂ©diterranĂ©e, ce qui les fait ressembler Ă  beaucoup d’impĂ©rialistes occidentaux des 19ème et 20ème siècle.

Ce que la fin du vingtième siècle a apporté de nouveau, c’est un renoncement à l’approche ouvertement racialiste de l’impérialisme occidental, et avec celui-ci, une certaine moralisation (toute relative) ou pondération des discours essentialistes relatifs aux populations du Sud à partir de la fin des années 1970. Pour autant, le tournant des années 1990 et l’émergence depuis deux décennies du terrorisme arabe[10] et islamiste ont renouvelé les discours suprémacistes occidentaux, qui à défaut d’afficher ouvertement leurs biais racistes, ont imposé l’idée que la défense de la démocratie occidentale ne pouvait passer que par la mise-au-pas des nationalismes arabes, toujours commodément assimilés aux fondamentalismes islamistes, quand bien même les deux le plus souvent s’opposent. L’idée de la citadelle assiégée et du rempart contre la barbarie venue d’Orient, qui trouve son origine dans la période prémédiévale, a trouvé un nouveau souffle : ce n’est plus l’Empire romain qui est en danger, mais la Démocratie occidentale dans son acception la plus large, ce qui implique que l’enjeu dépasse la seule sauvegarde des sociétés européennes et nord-américaines pour devenir la préservation de l’entièreté du « monde civilisé », dont les confins restent pourtant très flous.

Le Bien contre le Mal, ou la civilisation face au désert

Hannah Arendt (1906-1975), philosophe, politologue et journaliste allemande de renon, a analysé en profondeur les ressorts de la modernité et du totalitarisme, notamment à partir de l’expérience de l’horreur nazie. Là où beaucoup connaissent ou prétendent connaître ses travaux sur la banalité du mal, à savoir que les pires atrocités sont souvent permises ou commises par des gens ordinaires, voire insignifiants, peu en réalité accordent l’importance qu’il se doit à son analyse sur la complicité des victimes dans leur propre persécution, par lâcheté, naïveté ou attentisme. Arendt avait notamment révélé l’implication des Conseils Juifs (Judensräte en allemand) dans la déportation de Juif‧ves vers Auschwitz, provoquant une vive polémique qui lui a coûté certaines de ses amitiés[11]. Sans entrer dans le détail de la controverse, qui témoigne de l’incapacité du plus grand nombre à faire abstraction de son propre égo et à survivre à sa flétrissure[12] face à la révélation d’une vérité pénible à entendre ou de faits difficiles à admettre, ses écrits racontent l’impossibilité pour les sociétés occidentales de concevoir et d’accepter l’idée que la barbarie trouve en grande partie sa source au sein d’elles-mêmes. Il est intéressant de constater que l’avancée du désert[13] dont parlait également Hannah Arendt, et qui décrivait la montée des totalitarismes depuis l’intérieur des sociétés occidentales, puisse être le fait d’une population elle-même victime de ces totalitarismes. C’est à ce propos extrêmement révélateur qu’après avoir été persécutée pendant des millénaires en Occident, une part considérable de la communauté juive se soit persuadée qu’en s’installant au-delà des frontières de celui-ci, elle pourrait non seulement y trouver la paix et la sécurité, mais qu’en plus elle constituerait sur place un avant-poste de la démocratie face à la barbarie, aux limites mêmes entre la civilisation et le désert. Il s’agirait ni plus ni moins de civiliser l’Orient tout en recivilisant l’Occident. C’est en tout cas ainsi que le sionisme perçoit sa présence en Palestine et que les Etats-Unis justifient leur soutien inconditionnel à la colonisation israélienne : Israël serait le rempart de l’Occident moralisé (mais pourtant invivable pour les Juif‧ves) face à la violence débridée du Mordor[14] arabe (qui n’a pourtant pas participé à la Shoah). Il est confortable d’imaginer un ennemi extérieur dont on puisse se séparer à l’aide d’un simple mur, quand la réalité et l’expérience historique démontrent que le plus souvent l’ennemi est en nous ou parmi nous. Dans cette inversion de paradigme que constitue la colonisation de la Palestine par les sionistes, le désert dont parlait Arendt se retrouve incarné par ces colons venus d’Occident, tandis que le « désert » se situant face à eux est placé en position de subir son totalitarisme. Le paradoxe est tel que les sionistes, venus chercher herbe plus verte ailleurs, se retrouvent à brûler des oliviers centenaires pour planter partout des conifères[15] contribuant à l’appauvrissement de tout un écosystème auquel il‧elles sont totalement étranger‧es…

Les colons fanatiques qui Ă©tendent leur prĂ©sence au cĹ“ur de la Cisjordanie sous autoritĂ© palestinien‧ne ne se cachent pas d’y installer toujours plus d’avant-postes – illĂ©gaux – dans le but de rĂ©pondre Ă  un impĂ©ratif suprĂ©maciste percevant les Arabes comme une population Ă  expulser ou Ă  Ă©liminer au nom d’un combat mĂ©taphysique du Bien contre le Mal. L’expression de cette dualitĂ© prend alors la forme de discours violemment racistes qui n’ont rien Ă  envier Ă  ceux des thĂ©oriciens du nazisme envers les Juif‧ves. En 2009, Yitzhak Shapira et Yosef Elitzur, rabbins de la colonie de Yitzhar, situĂ©e Ă  cinq kilomètres au Sud de Naplouse, publiaient un livre intitulĂ© « Torat HaMelech » dans lequel ils dĂ©fendaient l’idĂ©e selon laquelle les Juif‧ves Ă©taient autorisĂ©s par les Ă©dits religieux Ă  tuer des non-Juif‧ves, y compris des enfants, dans certaines circonstances. Ces Ă©crits aux relents gĂ©nocidaires ont Ă©tĂ© soutenus par Dov Lior, rabbin d’HĂ©bron et de Kiryat Arba, mais Ă©galement leader charismatique de l’extrĂŞme-droite sioniste israĂ©lienne, qui a lui aussi justifiĂ© le meurtre de non-Juif‧ves Ă  plusieurs reprises, inspirant par ses discours transpirant la haine toute une frange de la droite israĂ©lienne. Dans le mĂŞme esprit, en 2012 le rabbin Eyal Karim, actuellement rabbin des forces armĂ©es israĂ©liennes, avait justifiĂ© l’usage du viol par les soldats en temps de guerre, considĂ©rant la chose en ces termes : « Puisque notre prioritĂ© est le succès de la communautĂ© dans la guerre, la Torah a permis [aux soldats] de satisfaire leurs mauvaises pulsions dans les conditions qu’elle a stipulĂ©es au nom du succès de la collectivité ». Les prĂŞches « anti-goyim » et anti arabes de ces rabbins alimentent le racisme qui justifie la commission de crimes au nom de la survie du peuple Juif, et qui ont une immense influence sur des centaines de milliers d’israĂ©liens. Depuis, les fondamentalistes religieux qui ont fait de la colonisation de la Palestine un enjeu messianique ont progressivement insufflĂ© leurs idĂ©es suprĂ©macistes et fascistes jusque dans les plus hautes instances de l’Etat israĂ©lien. Leur vision raciste et millĂ©nariste est parfaitement illustrĂ©e par le discours du premier ministre israĂ©lien Benyamin Netanhayu, prononcĂ© le 26 octobre 2023 pour justifier sa dernière offensive militaire contre les Palestinien‧nes de Gaza : « Nous sommes les fils de la lumière, ils sont les fils des tĂ©nèbres, et la lumière va prĂ©valoir sur les tĂ©nèbres […] Rappelez-vous ce qu’Amalek[16] vous a fait ». Lorsqu’il invoque l’extermination des « graines de Amalek », la rĂ©fĂ©rence n’est pas religieuse mais ethnique, dans la mesure oĂą l’islam est postĂ©rieur Ă  la pĂ©riode concernĂ©e par l’utilisation de cette notion pour dĂ©signer un peuple du SinaĂŻ en conflit avec les JudĂ©ens, les Edomites (8 Ă  5ème siècle av. J.C.). Au-delĂ , il s’agit bel et bien d’une promesse de vengeance qui trouve son origine dans la mythologie nationale. Dans le mĂŞme temps, nombre d’autres reprĂ©sentant‧es du gouvernement et du parlement israĂ©liens ont enchaĂ®nĂ© les dĂ©clarations racistes faisant l’apologie du meurtre de masse Ă  l’encontre des Arabes palestinien‧nes, alors que l’armĂ©e israĂ©lienne a engagĂ© l’opĂ©ration militaire la plus meurtrière de l’histoire d’IsraĂ«l, procĂ©dant Ă  l’épuration ethnique des Palestinien‧nes de Gaza sans qu’aucune instance internationale ni aucun Etat ne se donne les moyens d’arrĂŞter le massacre[17]. Mais ce n’est pas nouveau : depuis de nombreuses annĂ©es, le courant sioniste rĂ©visionniste dont la plupart des membres du gouvernement Netanyahu se rĂ©clament, lui y compris, multiplie les dĂ©clarations publiques ciblant les Arabes. Bien avant le 7 octobre, la droite israĂ©lienne dĂ©filait dans les rues avec le slogan « mort aux Arabes », qui est apparu plus d’une fois au cours de la dernière dĂ©cennie sur de larges banderoles portĂ©es par les manifestants. Par ailleurs, la pratique du « price tag attack » initiĂ©e depuis 2008 par les colons extrĂ©mistes proches de l’actuel ministre Itamar Ben Gvir inclue l’apposition de graffitis et la commission d’actes de vandalisme violemment anti Arabes. Ben Gvir, ainsi que Bezamel Smotrich et d’autres reprĂ©sentants du gouvernement israĂ©lien n’ont cessĂ© d’appeler Ă  la destruction des communautĂ©s arabes, employant une rhĂ©torique ouvertement raciste qui n’a plus rien Ă  voir avec la lutte contre l’islam radical ou le terrorisme[18]. Ce n’est pas l’islam qui est visĂ© par leurs discours incendiaires, mais très clairement l’ethnicitĂ© arabe. La boĂ®te de Pandore ouverte par les Ă©minences religieuses et par les reprĂ©sentants politiques israĂ©liens dont ils sont proches a lĂ©gitimĂ© le dĂ©bridement de la parole publique en IsraĂ«l, amenant un certain nombre de personnalitĂ©s Ă  exprimer des propos indubitablement racistes et suprĂ©macistes sans subir aucun revers de baton. L’un des exemples les plus Ă©loquents est la dĂ©claration de la prĂ©sentatrice TV Tzofit Grant Ă  propos des Palestinien‧nes de Gaza lors d’un show tĂ©lĂ©visĂ© en dĂ©cembre 2023 : elle les a qualifiĂ© de « loosers dĂ©goĂ»tants et puants, qui marchent en claquette. Un peuple repoussant. » Tout est dit. Enfin, lorsque Yoav Gallant qualifie les Gazaouis d’ « animaux humains », le choix du lexique employĂ© est lĂ  aussi socio-ethnique plus que religieux. Il n’est pas nĂ©cessaire de citer ici toutes les dĂ©clarations racistes Ă©mises publiquement par des personnalitĂ©s d’influence israĂ©liennes pour comprendre que le racisme anti Arabe est la motivation première des politiques israĂ©liennes.

La situation en Palestine incarne parfaitement tous les paradoxes des sociétés du Nord (occidentales) dans leur relation aux sociétés arabes en particulier et des sociétés anciennement colonisées en général, parce que les Israéliens sont majoritairement issus de ces sociétés impérialistes du Nord. A ce titre, Ils sont allochtones et importent au Proche-Orient une manière de penser ultra-individualiste, ethnocentrique et néolibérale propre aux sociétés du Nord. Se considérant à la pointe de la civilisation et de la démocratie, la très grande majorité des Israéliens (les sionistes) ne conçoivent jamais le monde arabe comme leur égal, et nient la réalité même des cultures et du progressisme arabe : pour elles‧eux, les Arabes ne peuvent être ni modernes ni démocrates. Les Arabes ne sont qu’un obstacle à la modernité capitaliste, et à ce titre leur éradication seule devient la garantie de l’ordre social et de la paix. Avec le génocide en cours à Gaza depuis le 8 octobre 2023, l’extrême-droite européenne s’est massivement solidarisée avec l’Etat d’Israël, tant sa manière de procéder à l’égard des Arabes constitue un modèle en matière d’arabicide efficace. La haine des Arabes et des Musulmans a pris le pas sur leur antisémitisme historique et il‧elles semblent avoir subitement renoué avec la part juive de leur identité judéo-chrétienne, tout en niant la part sémite de l’identité arabe.

Depuis le 11 septembre 2001 et le lancement de la guerre contre le terrorisme (War on Terror) initiée par les Etats-Unis, la communauté internationale constituée des Etats les plus influents (ONU, OTAN, G7, G20) et de leurs Etats-clients, se sont rangés derrière les néo-conservateurs américains et leur croisade idéologique et militaire contre le monde musulman. Précisons que les Arabes ne sont pas majoritaires dans le monde musulman, plus de 60% des musulmans étant asiatiques (Indonésie, Inde, Pakistan, Bangladesh) et 15% subsahariens (Afrique). La croisade occidentale contre le « terrorisme » se concentre pourtant essentiellement sur le monde arabe et l’ancienne perse (Afghanistan, Pakistan, Iran). Quoi qu’il en soit, l’accusation de terrorisme suffit à elle-même pour légitimer toutes les formes de violences à l’encontre des personnes ou groupes visés : détentions administratives sans charges, assassinats extra-judiciaires, torture, sièges et coupure des vivres et ressources, expulsions et déportations, mais aussi « bombardements de saturation » (carpet bombings) de zones résidentielles accusées d’abriter ou de soutenir des groupes terroristes[19]. Les lois de la guerre ont été soumises à tant de dérogations qu’elles sont devenues caduques. Les crimes de guerre sont même légitimés par des doctrines militaires telles que la doctrine Dahiya esquissée par le chef d’état-major israélien Gadi Eizenkot en 2010 après avoir été appliquée par l’armée coloniale israélienne au Liban en 2006. Celle-ci autorise l’emploi asymétrique et disproportionnée de la force pour faire pression sur des régimes hostiles, notamment en détruisant de façon systématique les infrastructures civiles liées à l’ennemi, et y compris si ces bombardements impliquent le massacre de centaines de civils. Il ne fait aucun doute que la stratégie employée à Gaza depuis le 8 octobre 2023 est l’application stricte de cette doctrine, les villes de Gaza, Jabalia, Deir-el-Balah, Khan Younis, Rafah, ainsi que leurs périphéries (2,14 millions d’habitants sur 365 km², soit 5967 habitants/km²) ayant été bombardées intensivement, induisant le massacre assumé de 40 000 à 200 000 civils Palestinien‧nes n’ayant évidemment aucune responsabilité dans l’attaque du 7 octobre. La notion-même de « victime collatérale » qui était déjà assez insupportable n’est plus mise en avant, le gouvernement génocidaire israélien affirmant sans trembler que tous les habitant‧es de Gaza sont liés au Hamas et qu’il‧elles sont des « animaux »[20]. Il s’agit donc, au sens hébraïque du terme, d’un holocauste[21], et donc d’un génocide.

Cette rhétorique raciste et génocidaire, implicitement approuvée par l’ensemble des alliés d’Israël, en tête desquels se trouvent toutes les anciennes puissances coloniales, fait écho aux discours racistes et islamophobes qu’on voit banalisées par l’ensemble de la classe politique européenne, de l’extrême-droite au centre-gauche, et désormais aussi par les sociaux-démocrates et libéraux qui se font encore appeler socialistes dans plusieurs pays. Au-delà, même la gauche radicale a depuis longtemps repris à son compte les poncifs contre le terrorisme, bien incapable d’apporter une critique sérieuse et intelligente de la notion, de l’emploi qui en est fait, mais aussi et surtout du glissement sécuritaire et fasciste que l’utilisation galvaudée de cette notion entraîne. L’ethnocentrisme des Blancs (appelons un chat un chat) implique qu’à chaque attaque armée contre les leurs, contre leurs intérêts ou sur leur territoire, une union sacrée déclare la patrie ou la démocratie menacée, quand bien-même depuis les années 1970 les principales victimes du terrorisme sont les Musulmans. Les pays les plus meurtris au cours des quinze dernières années sont en effet l’Afghanistan, l’Iraq, la Somalie, le Nigeria, le Burkina Faso, le Pakistan, la Syrie et le Yemen. En Iraq et en Syrie, les groupes islamistes liés à Al Qaeda et l’Etat islamique ont majoritairement tué des Musulmans[22]. Et lorsque la communauté internationale intervient militairement pour riposter au terrorisme, elle anéantit les sociétés civiles déjà prises pour cibles par les groupes armés et entretient par là le terreau désastreux sur lequel se développent la haine et le fondamentalisme. L’ironie de l’histoire, et c’est ce que les sociétés du Nord refusent de comprendre (ou nient consciemment), c’est que le « terrorisme » est en réalité un réflexe d’auto-défense de société ou d’individus écrasés par le capitalisme et l’impérialisme qui en découle.

Ce que cette rĂ©alitĂ© continue d’occulter avec succès, c’est que la motivation et l’objectif des guerres impĂ©rialistes ne sont jamais l’instauration de la paix et de la dĂ©mocratie, mais plutĂ´t le maintien d’un statu quo chaotique tout Ă  fait compatible avec la prĂ©dation capitaliste et le pillage des ressources qu’elle implique. Aucun des pays oĂą les Etats-Unis et ses alliĂ©s sont intervenus depuis les annĂ©es 1960 n’a vu l’installation d’un rĂ©gime dĂ©mocratique durable, bien au contraire. Toute dĂ©mocratie arabe, au contraire, menacerait l’économie occidentale parce qu’elle s’accompagnerait de l’auto-gestion de ses ressources et d’une remise en question probable de l’hĂ©gĂ©monie Ă©conomique des pays du Nord, tout en permettant Ă  ses ressortissant‧es de revenir au pays et de voyager librement, sans continuer de constituer une main-d’œuvre exploitĂ©e exclusivement par les anciennes puissances coloniales. A contrario, plusieurs pays du Nord, mais aussi les pĂ©tromonarchies de la pĂ©ninsule arabique, ont activement soutenu des groupes armĂ©s islamistes dans le centre et le Nord de la Syrie, dans l’espoir de dĂ©stabiliser le rĂ©gime d’Assad et ses alliĂ©s russo-iraniens, tout en appuyant militairement les Kurdes afin de garder Ă  l’abri les ressources en pĂ©trole du Nord-Est de la Syrie, qui constituent 70% des ressources totales du pays. En 2019, le prĂ©sident des Etats-Unis Donald Trump dĂ©clarait ainsi : « Nous gardons le pĂ©trole, ne l’oubliez pas. Nous voulons garder le pĂ©trole. Quarante-cinq millions de dollars par mois. »

Les interventions occidentales s’inscrivent dans un continuum colonial dont les enjeux et objectifs n’ont jamais changé depuis le 19ème siècle. L’une des démonstrations éloquentes de cette affirmation est le désintérêt total de la communauté internationale pour la révolte démocratique et non-confessionnelle de la population du gouvernorat de Suwayda en Syrie, qui a débuté en août 2023 et se poursuit toujours plus d’un an plus tard. Le fait que la région soit à majorité Druze, une minorité qu’il est impossible d’associer à l’islamisme, et qu’elle n’ait sur son territoire aucune ressource d’importance, en fait un enjeu négligeable pour des régimes capitalistes habitués à mettre dos-à-dos les communautés ethniques et religieuses dans le but de tirer un profit économique du désordre engendré. Il ne peut y avoir de mouvement démocratique arabe qui suscite l’intérêt des démocraties occidentales. Pour elles, « Démocratie » et « Arabe » forment un oxymore. Israël, qui se présente en démocratie et qui occupe les villages Druzes du Golan depuis 1967, ne semble pas non plus intéressé à encourager l’émergence d’un mouvement démocratique et non-confessionnel parmi les Arabes druzes vivant à proximité. On peut légitimement penser que l’existence d’Israël est moins menacée par les attaques armées du Hamas et du Hezbollah que par l’instauration de régimes arabes véritablement démocratiques à ses frontières. En effet, une démocratie arabe véritable ne saurait souffrir de la présence de l’entité coloniale et n’aurait cesse de remettre en question son existence, a minima par solidarité avec les Palestinien‧nes soumis‧es à son régime violent d’apartheid. Celles‧ceux qui croient qu’Israël promeut la paix et la démocratie au Proche-Orient se fourvoient : la guerre lui est autrement plus bénéfique, et c’est la raison pour laquelle Israël a consciencieusement saboté les accords de paix engagés avec l’Organisation pour la Libération de la Palestine (OLP), facilitant l’assassinat de ses artisans Yitzhak Rabin (en 1995) et Yasser Arafat (en 2004), avant de favoriser l’émergence du Hamas dans le but avéré de faire échec à ses opposants modérés et non confessionnels du Fatah, notamment du très populaire Marwan Barghouti, emprisonné depuis 2002 suite à deux tentatives d’assassinat échouées. Jusqu’à ce jour, Israël n’a jamais protégé la démocratie, mais au contraire promu le fascisme pour maintenir son existence illégitime, encouragée par ses parrains étasunien et britannique pour lesquels Israël constitue le meilleur avant-poste ou cheval de Troie au Proche-Orient qui puisse exister.

Les guerres incessantes au Proche-Orient, mais également les politiques mises en place en Europe et aux Etats-Unis, s’accompagnent ainsi d’un arabicide physique et culturel permanent sous prétexte de combattre le terrorisme, de protéger la démocratie et de défendre les « valeurs occidentales ». Israël se place dans le continuum logique de cette approche suprémaciste/impérialiste.


NOTES :

[1] Nombre de ces colonies sont des kibboutz, ce qui ne leur enlève pas leur statut de colonie.

[2] Voir la carte établie par « October 7th Geo-visualization Project » : https://oct7map.com/

[3] Au 3 septembre 2024, 117 otages ont été libérés, dont 100 à l’issue de négociations avec le Hamas. 97 otages sont toujours à Gaza, dont 33 sont présumés morts.

[4] Ces fake news ont été debunkée par plusieurs media, dont le media israélien Haaretz : les mensonges s’appuyaient sur les fausses déclarations de l’ONG sioniste Zaka, qui identifie des victimes du terrorisme, des accidents de la route et autres catastrophes en Israël et partout dans le monde. Il est utile de rappeler que son fondateur Yehuda Meshi-Zahav a été poursuivi pour une série de viols et violences sexuelles commis sur plusieurs années, ainsi que des détournements de fonds, avant de décéder dans le coma en 2022 suite à une tentative de suicide.

[5] La première croisade de 1095-1096 s’en prend également aux Juif‧ves.

[6] D’après les résultats d’une étude menée en 2015-2016 par le MENA Arts Advocacy Coalition (MAAC) : https://www.menaartsadvocacy.com/

[7] Ces exemples ont été pris de manière totalement arbitraire, mais évidemment la liste est bien plus longue.

[8] Le 1er février 2024 deux militants fascistes Lyonnais du groupe Les Remparts, Pierre-Louis Perrier et Sinisha Milinov, ont poignardé de douze coups de couteaux trois personnes arabes à la sortie d’une boîte de nuit.

[9] J’inclue le « sionisme de gauche » des kibboutzim dans la catégorie du nationalisme modéré.

[10] Le « terrorisme » au nom du nationalisme arabe a été initié dès les années 1970 par les organisations palestiniennes Septembre Noir, fondée en 1970 par des membres du Fatah, et Fatah-Conseil Révolutionnaire (Fatah-CR), fondée en 1974 par Sabri al-Banna (« Abu Nidal ») sous l’impulsion de Saddam Hussein. La première est connue pour l’assassinat du premier ministre jordanien Wasfi Tall le 28 novembre 1971 et la prise d’otage et l’exécution de 11 athlètes israéliens lors des JO de Munich les 5 et 6 septembre 1972. La seconde est tenue pour responsable d’attentats et d’assassinats ciblés ayant conduit à la mort de plus de 300 personnes entre 1972 et 1997.

[11] Voir le film « Hannah Arendt » de Margarethe von Trotta, 2012.

[12] L’une des principales critiques qui a été faite à Hannah Arendt est de ne pas « aimer les Juifs ». En hébreux, cet amour spécifique porte un nom, Ahavat Israël.

[13] Le dĂ©sert est entendu ici comme le lieu oĂą disparaĂ®t ce qui constitue « le monde », c’est-Ă -dire ce qui relie les humains, Ă  savoir l’ensemble des relations sociales oĂą naĂ®t le politique.

[14] Dans le roman fantastique de J.R.R. Tolkien Le Seigneur des Anneaux, le Mordor est une région qui se situe à l’extrême Orient de la Terre du Milieu et qui constitue le fief du Seigneur des Ténèbres et des forces du mal.

[15] Le Fond National Juif a pris en charge la plantation de 240 millions d’arbres, majoritairement des pins considérés comme invasifs par les naturalistes, qui leur reprochent d’appauvrir les sols et d’empêcher à d’autres espèces végétales de se développer, tout en constituant un facteur majeur d’incendies.

[16] Le discours de Netanyahu fait référence ici aux écrits du Deutéronome 25 :17 de l’Ancien Testament qui mentionnent l’attaque des Hébreux par les Amalécites, descendants d’Amalek, lors de leur exode depuis l’Egypte. Les Amalécites incarnent dans le judaïsme l’ennemi archétypal des Juifs‧ives, sans que leur existence en tant que groupe ethnique ou social n’aie jamais pu être établie par les historiens et archéologues. Et si tel était le cas, il est improbable que ceux-ci aient un lien quelconque ni avec les Philistins, ni avec les Arabes de Palestine.

[17] Au moment où ces lignes sont écrites, soit cent jours exactement après le déclenchement de la guerre, on décompte 40861 morts Gazaouis, dont 16164 enfants et 10399 femmes, auxquels s’ajoutent plus de 94100 blessés et 10000 disparus. 220 employés de l’ONU, 172 journalistes, 523 professionnels de santé et 76 membres de la défense civile ont été tués. Près de 2 millions de Gazaouis ont été déplacés de force et à plusieurs reprises dans la partie Sud de la bande de Gaza, sans possibilité de quitter le territoire. 516 500 habitations ont été détruites, ainsi que 439 écoles, 763 lieux de culte et 19 hôpitaux.

[18] Il est nécessaire de se rappeler que le 26 février 2023, des centaines de colons israéliens aidés par l’armée d’Israël avaient attaqué le village de Huwwara, se livrant à des incendies et violences volontaires d’une telle ampleur que la presse internationale avait qualifié l’attaque de pogrom. Le ministre des finances israélien, Bezamel Smotrich, avait alors exprimé son souhait que le village Palestinien soit « rasé ». Ce n’était alors qu’un avant-goût de la violence raciste et suprémaciste qui s’est déployée à l’occasion de l’offensive sur Gaza quelques huit mois plus tard.

[19] Les premiers exemples de « tapis de bombes » sont le bombardement de Guernica et Barcelone par les fascistes en 1937-1938 ou celui de Chongqing (Chine) par le Japon en 1938, avant que cette pratique soit banalisée autant par les Nazis (Varsovie, Rotterdam, Londres, Coventry) que par les Alliés (Hambourg, Dresden, Tokyo) durant la seconde guerre mondiale, puis par l’aviation américaine au Vietnam en 1964-1965.

[20] Propos du ministre de la Défense israélien Yoav Gallant le 9 octobre 2023 : “We are imposing a complete siege on Gaza. There will be no electricity, no food, no water, no fuel. Everything will be closed. We are fighting human animals and we act accordingly”

[21] Le dictionnaire Larousse indique en effet : « Holocauste (bas latin holocaustum, du grec holokaustos, de holos, entier, et kaustos, brĂ»lĂ©) : Dans l’ancien IsraĂ«l, sacrifice religieux oĂą la victime, un animal, Ă©tait entièrement consumĂ©e par le feu ; la victime ainsi sacrifiĂ©e »

[22] Mon propos n’est pas ici de nier les nombreuses victimes Yézidies, Kurdes, Druzes, Chrétiennes ou appartenant à d’autres minorités prises pour cible par les islamistes, mais de confronter les chiffres totaux en termes de proportions. Les huit principaux groupes djihadistes (ISIL, Taliban, Boko Haram, Al-Shabaab, Tehrik-i-Taliban Pakistan, islamistes peuls, Al-Qaeda en Iraq et Al-Qaeda) ont fait près de 100 000 victimes depuis 2000.